“Sept d’un coup !”, s’écrie le Vaillant Petit Tailleur en tuant sept mouches d’un seul coup ! Qui ne connaît pas Blanche-Neige et les sept nains ? Et le Petit Poucet ? Lui et ses six frères, abandonnés par leurs parents dans une forêt, arrivent dans la maison d’un ogre, père de sept filles, et qui aime la chair fraîche. Heureusement, les sept garçons parviendront à échapper à l’ogre, qui pourtant les poursuivait chaussé de ses bottes de sept lieues !
Qu’ils soient des frères Grimm ou de Charles Perrault, les contes et légendes du folklore européen contiennent souvent le chiffre 7.
Difficile d’inventorier tous les pays où ce nombre est important. Mais, selon le Livre des Superstitions (coll. Bouquins, éd. Robert Laffont, p. 1622), il était présent dans de nombreuses traditions gréco-romaines — c’est pourquoi cet article évoquera des éléments qui vont par sept, principalement en Grèce et à Rome.
Le chiffre sept possède en lui-même un pouvoir, c’est un nombre magique, selon le Dictionnaire des Symboles (coll. Bouquins, p. 860 sq.). Il symbolise la totalité de l’espace et la totalité du temps, … il désigne la totalité des ordres planétaires (les sept planètes du système solaire) … la totalité des énergies et principalement dans l’ordre spirituel (les sept degrés de la perfection), parce qu’il est la somme de 4 (représentant la Terre, avec ses quatre points cardinaux) et 3 (représentant le Ciel).
La Tradition donne à la Grèce sept sages, pourvus de sagesse pratique (hommes d’État, législateurs, philosophes du VIIè et du VIè siècles avant notre ère). La liste varie selon les auteurs, mais elle comprend, entre autres, Solon d’Athènes et Thalès de Milet (l’auteur du fameux théorème). On leur attribue toutes sortes de proverbes ou de sentences, telles que celles qui étaient inscrites à Delphes, “Connais-toi toi-même” (ΓΝΩΘΙ ΣΕΑΥΤΟΝ) et “Rien de trop” (Symboles, p. 916).
Pythagore, savant, philosophe et mystique du VIè siècle avant notre ère, pour qui le “sept” était le véhicule de la vie humaine, … croyait que notre “tempérament” subit d’importants changements tous les sept ans : à chaque septime, l’ensemble des solides et des fluides du corps sont entièrement renouvelés. Cette septième année, appelée “année climatérique”, est considérée comme une étape très importante dans la vie de chacun.
Solon, législateur et poète athénien (mort en 558 avant notre ère), partageait l’existence de l’homme en dix septénaires, caractérisés chacun par une modification significative : dans le premier septénaire, les premières dents tombent ; dans le deuxième, l’homme atteint la puberté ; dans le troisième, la barbe lui croît ; dans le quatrième, il acquiert la force ; dans le cinquième, il devient mûr pour la propagation ; dans le sixième, il commence à modérer ses désirs ; dans le septième, il voit augmenter sa prudence (Superstitions, p. 1622 sq.).
Autre savant grec, Hippocrate, dont on voit ci-dessous une représentation exposée au Musée de Nagasaki (Japon), fut un illustre médecin grec né dans l’île de Cos (c. 460- c. 370 avant notre ère). On a donné son nom au Corpus hippocratique (une soixantaine de traités de médecine), dans lesquels se trouve ce dicton : La vie est courte, la science est longue, l’occasion passagère, l’expérience dangereuse, le jugement difficile.
Selon le Dictionnaire des Symboles, on prête à Hippocrate cette sentence : Le nombre sept, par ses vertus cachées, maintient dans l’être toutes choses ; il dispense vie et mouvement ; il influence jusqu’aux êtres célestes.
Les dieux, êtres célestes, les héros et autres créatures mythiques n’étaient jamais très loin de la vie des Grecs anciens.
Par exemple, le nombre sept est caractéristique du culte du dieu Apollon ; les cérémonies apolliniennes se célébraient le septième jour du mois (ibid.).
Apollon, dieu solaire bénéfique, mais souvent cruel, et sa soeur jumelle Artémis/Diane avaient tué de leurs flèches les sept enfants de Niobé qui s’était vantée d’avoir une plus belle famille que Latone, la mère des jumeaux. Niobé pleura tellement cette perte qu’elle fut transformée en pierre.
Dans la mythologie grecque, Iris, messagère des dieux et déesse de l’arc-en-ciel, porte une écharpe de sept couleurs.
On rencontre aussi les Pléiades (les sept filles du Titan Atlas métamorphosées en constellations), les sept nymphes (auparavant Callisto, aimée de Zeus, et ses compagnes) devenues la constellation de la Grande Ourse, et les Hespérides (les sept filles de Nyx, la Nuit, et de l’Obscurité, Érèbe) qui vivaient à l’extrême occident, au bord d’Océan, gardant un arbre qui produisait des pommes d’or, cadeau de Gaïa à Héra quand cette dernière épousa Zeus (Dictionnaire de l’Antiquité, coll. Bouquins, p. 498).
Les Hespérides avaient reçu la déesse Éris (la Discorde) et lui avaient donné la pomme qui causa la Guerre de Troie.
Les pommes d’or du jardin des Hespérides étaient gardées par un dragon (que tua Hercule) — dragon que l’on distingue sur la toile peinte par William Turner représentant la visite de la déesse Discorde aux Hespérides (1806, Tate Britain, Londres).
Quant au poète Homère, chantre de la Guerre de Troie, sept villes se disputaient l’honneur de l’avoir vu naître : Argos, Athènes, Chio, Colophon, Rhodes, Salamos et Smyrne (Antiquité, p. 509). L’humoriste français Alphonse Allais (1854-1905) y ajoutait malicieusement la ville imaginaire d’Alaure (car ne dit-on pas Homère d’Alaure ?) !
En Grèce encore, la ville de Thèbes était ceinte de remparts percés de sept portes — et le poète Eschyle fit jouer sa tragédie intitulée Les Sept contre Thèbes en 467 avant notre ère. Il met en scène la lutte fratricide entre les deux fils d’Oedipe (Étéocle, roi de Thèbes, et Polynice, qui veut sa place) — prélude à l’histoire tragique d’Antigone, leur soeur.
Les Grecs de l’époque hellénistique (fin IVè s.-Ier s. avant notre ère) avaient recensé Sept Merveilles du monde antique : les Pyramides d’Égypte, les jardins suspendus de Babylone, le mausolée d’Halicarnasse, le temple d’Artémis à Éphèse, la statue de Zeus à Olympie (sculptée par Phidias), le colosse de Rhodes et le phare d’Alexandrie (Antiquité, p. 916).
Enfin — pour clore momentanément la liste sur le 7 et la Grèce — l’alphabet grec contient sept voyelles : α (alpha), ε (epsilon), η (êta), ι (iota), ο (omicron), υ (upsilon), et ω (oméga) !
Quant aux anciens Romains, ils ont vécu géographiquement dans une ville aux sept collines (le Capitole, le Palatin, l’Aventin, l’Esquilin, le Quirinal, le Viminal et le Caelius)
et ils ont connu historiquement sept rois, avec l’avènement de Romulus (753 avant notre ère) suivi de six autres : Numa Pompilius, Tullius Hostilius, Ancus Martius, Tarquin l’Ancien, Servius Tullius et Tarquin le Superbe. Ce dernier viola Lucrèce, une respectable Romaine, qui se poignarda devant son mari et son père pour attester de son innocence et leur demander de la venger. Le scandale provoqua la fin de la monarchie en 510 avant notre ère.
C’est du latin septem (lui-même dérivé du grec επτα hepta) que viennent les mots français “sept, septembre, septennat, septentrion (désignant l’étoile polaire dans la Grande Ourse, donc le Nord), septième, septuagénaire” etc. ainsi que l’anglais “seven”, l’allemand “sieben”, l’espagnol “siete”, l’italien “sette” etc.
Le Livre des Superstitions affirme qu’en Europe, le sept, chiffre sacré et mystique, est particulièrement bénéfique. On prétend également que c’est la réputation de ce chiffre qui a poussé la société Boeing à baptiser ses avions 727, 737, 747, 777.
Dans la tradition japonaise, avoir 70 ans est un âge rare (koki, en japonais) et atteindre 77 ans est qualifié de joyeuse longévité (kiju), car la calligraphie du mot “joie” ressemble au nombre japonais 77 (Symboles, p. 53). Quant à Hergé, auteur des albums B.D. de Tintin, n’a-t-il pas dédié son oeuvre aux jeunes de 7 à 77 ans ?
Cependant, ce nombre se révèle parfois maléfique, comme en témoignent les expressions “sept ans de malheur” (quand on casse un miroir), “tourner sept fois sa langue dans sa bouche” (pour éviter de commettre un impair) etc.
Qu’il soit question de “mercenaires”, “samouraïs”, “piliers de la Sagesse”, “ans de réflexion”, “jours de la semaine”, “notes de la gamme”, “péchés capitaux” — et j’en oublie — le “sept” est partout.
Vous vous demanderez peut-être pourquoi un article sur ce sujet ?
Eh bien, aujourd’hui, 26 septembre 2020, mon blog a 7 ans. Ce n’est peut-être pas l’âge de raison, mais c’est sûrement un âge raisonnable pour un blog !