Après Prague, je suis allée à Bratislava, charmante capitale de la Slovaquie. N’y étant restée qu’une journée, j’ai notamment parcouru à pied le centre-ville historique et suis montée au château — ce qui m’a permis de glaner, comme à Prague, quelques détails architecturaux rappelant l’Antiquité gréco-romaine.
D’ailleurs, bien que fondée au Xè siècle, Bratislava fut à l’origine une place-forte romaine (un oppidum), dominant le Danube qui servit de frontière à l’Empire romain.
Je n’ai pas vu de fouilles archéologiques. Mais j’ai admiré de vieux bâtiments colorés, dont beaucoup sont religieux et créent une atmosphère paisible dans Bratislava — ancien centre politique, culturel et économique d’Europe centrale, autrefois capitale de la Hongrie sous le règne des Habsbourg (après que les Turcs eurent pris la ville de Buda, au XVIè siècle).
L’hôtel de ville actuel est situé dans l’ex-archevêché, palais épiscopal, dit Palais primatial, construit au XVIIIè siècle avec une architecture baroque, d’inspiration grecque.
En effet, le bâtiment montre des pilastres (piliers carrés encastrés dans la façade) surmontés de chapiteaux corinthiens, un fronton triangulaire, et des statues en pierre (ou acrotères) sur le toit.
L’inscription en latin ecclésiastique Curia archi-episcopalis peculio cardinalis Josephi Debatthiane excitata signifie : “Archevêché (ou Curie archi-épiscopale) érigé avec l’argent du cardinal Josef Batthyanyi” (qui en fut le premier propriétaire). Le toit bordé d’une balustrade est orné de statues figurant des personnages de l’Antiquité. On en aperçoit un qui tient une couronne de laurier dans la main, un autre qui porte l’uniforme d’un soldat ou d’un empereur romain. On distingue nettement la déesse Athéna/Minerve à ses attributs : la lance et le bouclier, lui-même représentant la tête de Méduse. Quant au fronton, il est décoré de personnages peints, habillés à l’antique de tuniques et péplums, censés représenter les qualités humaines du cardinal.
Derrière cet imposant immeuble se trouve la place principale de la vieille ville de Bratislava, sur les côtés de laquelle s’alignent diverses ambassades et bâtiments prestigieux, notamment l’ancien hôtel de ville (dont la construction s’est étalée du XIIIè au XVIè s.), avec sa tour.
À côté de l’ancien hôtel de ville, une église accueillait un mariage au moment où je faisais ma visite. Et au-dessus du portail de l’église l’inscription en latin biblique Sic Deus dilexit mundum signifie : “Ainsi Dieu a-t-il aimé le monde” ou bien “Dieu a aimé le monde ainsi”. Elle rappelle la phrase de l’évangéliste Saint Jean qui a écrit : “Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en Lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle.”
En face de cette même église se dresse une haute colonne qui porte à son sommet la Vierge Marie et dont le socle est gravé en latin sur deux côtés.
Les inscriptions de part et d’autre du socle sont la dédicace du roi Léopold de Hongrie (1640-1705) Leopoldus Romanorum imperator semper augustus Hungariæ rex …, qui, après une victoire sur les Turcs, fait ériger cette statue Honori Mariæ Virginis sine macula conceptæ Patronæ regni Hungariæ “en l’honneur de la Vierge Marie conçue sans péché patronne du royaume de Hongrie”— statue inaugurée en MDCLXXV, le 23 mai 1675.
Pour l’Histoire, le roi Léopold de Hongrie, dit Léopold 1er, fut aussi roi de Bohême, archiduc d’Autriche, “roi des Romains, empereur du Saint-Empire romain germanique” … et canonisé comme saint. Pour la petite Histoire, il était le cousin germain de Louis XIV, roi de France.
Il n’est pas surprenant de voir autant de monuments ou bâtiments religieux à Bratislava, qui fut pendant presque trois cents ans le lieu de couronnement des rois et reines de Hongrie, de religion catholique. Cependant, certaines églises, désaffectées, ont été transformées en musée ou en bâtiment municipal.
Sur la même place principale, mais dans un registre profane, on peut voir un autre monument avec une colonne soutenant la statue d’un chevalier en armure : c’est la “Fontaine de Maximilien”, nommée ainsi pour honorer Maximilien II, roi de Hongrie, qui fit construire une fontaine pour alimenter en eau la population.
A part la date d’édification (MDLXXII, 1572), je n’ai pas pu lire l’inscription latine, mais j’ai remarqué le petit château dans le blason gravé au-dessus de cette inscription.
Le temps d’apercevoir encore quelques détails architecturaux d’inspiration grecque, comme ces fenêtres encadrées d’atlantes (hommes forts qui soutiennent des chapiteaux) ou ornées d’une frise à la grecque, ou encore cette porte ouvragée gardée par des caryatides,
j’ai pris ensuite une rue pavée escarpée pour monter jusqu’au château.
Perché sur une colline, le château domine la vieille ville et le Danube. Quand on arrive en bateau, on le voit de loin ; et quand on est sur la terrasse du château, on peut voir, par temps clair, trois pays : la Slovaquie, l’Autriche et la Hongrie. Ce château a connu deux siècles de gloire lorsqu’il hébergeait les bijoux de la couronne de Hongrie.
Il est devenu le symbole de Bratislava — figurant même sur les plaques d’égout.
Après différentes fortifications érigées au fil du temps, la construction d’un château en pierre commença au XIIIè siècle. Au XVIè siècle, muni de quatre corps de bâtiment autour d’une cour, il devint une forteresse imprenable. Mais, ayant subi plusieurs incendies aux XVIè et XIXè siècles, il a été reconstruit dans les années 1950-1960.
Des sculptures extérieures du château actuel rendent hommage à l’Antiquité romaine.
Le grand portail d’entrée est surmonté de faisceaux de drapeaux, d’armes et d’armures — lesquelles s’inspirent des armures des légionnaires romains.
Si les petits canons révèlent la modernité, le sigle SPQR ainsi que l’aigle romaine et l’enseigne de légion affirment symboliquement une filiation de l’ex-Saint-Empire romain germanique envers la Rome antique.
Je n’ai pas pu visiter l’intérieur du château. Mais sa terrasse était remplie par la parade de voitures de luxe (des Porsche !) et de mariés désireux d’immortaliser leur grand jour par des photos prises dans un décor royal.
Plus tard, je me suis demandé s’ils avaient eu pour gâteau de mariage une réplique du château fournie par cette pâtisserie de Bratislava !
Magnifique visite guidée de Bratislava. On peut suggérer également une halte de quelques jours ou plutôt quelques nuits pour profiter d’une immersion musicale sans pareille. Vienne est toute proche et les artistes se produisent d’une ville à l’autre. Opéras, ballets, concerts à des prix défiant toute concurrence. J’ai gardé d’un séjour en décembre, il y a quelques années, un souvenir inoubliable.La prochaine fois, j’emporterai votre précieux billet avec moi.